"Archives Israélites"
jeudi 1er juin 1905
LA SÉPARATION ET LES ISRAÉLITES D'ALGÉRIE

    Dans notre numéro du 11 mai, nous avons montré combien le régime de la Séparation serait dommageable au culte israélite en Algérie, dont il désorganiserait les services, qu'il livrerait aux divisions intestines et nous avons ajouté qu'il y avait un intérêt politique sérieux à maintenir le système actuel qui facilite l'assimilation des Juifs algériens à ceux de la Métropole.
    Le Consistoire israélite d'Alger vient de prendre l'initiative de saisir le gouverneur général d'un mémoire où il expose d'autres motifs non moins intéressants qui militent en faveur du maintien de l'organisation consistoriale.
    Il commence par faire valoir que la disposition du régime actuel aurait pour conséquence de mettre à la charge des bureaux municipaux de bienfaisance l'assistance aux israélites indigents si nombreux en Algérie.
    Il ajoute :
    Si nos communautés d'Algérie pouvaient, comme les communautés de France, trouver dans les perceptions autorisées par le projet de la commission les moyens de subvenir à leurs besoins, elles n'auraient guère d'objections à présenter contre l'application de la loi à l'Algérie, car elles seraient capables de s'imposer les légers sacrifices que lui imposerait la suppression de l'allocation très modeste faite par l'État pour les services du culte israélite en Algérie ; mais nos communautés, si elles perçoivent certains revenus de minime importance pour la location des places dans les synagogues  et pour le service religieux à l'occasion des mariages ou des cérémonies funèbres, tirent, en réalité, le principal de leurs ressources de la taxe rituellique sur la viande (kascher), elle est commune à tout le judaïsme de l'Orient et de l'Afrique ; c'est le seul mode de perception possible et le seul aussi qui puisse procurer les ressources très importantes nécessaires à la bonne marche des communautés, tant pour le service du culte que pour l'instruction religieuse, et surtout pour le service de la bienfaisance.
    L'application à l'Algérie de la loi sur la séparation nous parait impliquer la suppression immédiate aux communautés du droit de percevoir la taxe précitée. C'est décréter la fin même des grandes communautés de l'Algérie, puisque, sans ressources stables et régulières, il ne leur sera jamais possible de subsister.
    La requête termine en demandant au gouverneur de défendre devant le Parlement les intérêts de tous les israélites d'Algérie.
    L'application de la Séparation présente également des inconvénients au point de vue du clergé catholique que M. le gouverneur général a signalé dans une interview.

    D'un autre côté, M. Albin Rozet, député, a déposé un amendement portant qu'un règlement d'administration déterminera les conditions et l'époque de l'application à l'Algérie de la Séparation.
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