"Archives Israélites"
jeudi 16 novembre 1905
LA SÉPARATION AU
SÉNAT
Le Sénat, dans sa séance de jeudi 9 novembre,
a abordé à son tour l'examen de la loi de Séparation
des Églises et de l'État votée par la Chambre à
plus de cent voix de majorité.
On sait que le rapport de cette loi a été
fait par M. Maxime Lecomte.
La discussion générale a commencé
par l'audition de plusieurs membres qui ont demandé l'ajournement,
mais me Sénat a passé outre.
Le Consistoire Central a confié à
l'un de ses membres la rédaction d'un mémoire qui a été
adressé à la Commission de la Séparation du Sénat
et où sont mis en lumière quatre dispositions de la loi votée
par la Chambre qui lèsent tout particulièrement les intérêts
du culte israélite. C'est d'abord le chiffre de vingt-cinq membres
requis pour la constitution d'une association cultuelle, qui ne peut être
atteint dans plusieurs communautés de France; l'octroi d'une allocation
pendant quatre ans aux ministres des cultes, n'ayant pas de titre à
la pension, accordée à ceux qui fonctionnent dans les communes
de moins de mille habitants et dont beaucoup de rabbins et d'officiants
ne pourront bénéficier parce qu'ils exercent tous leur ministère
dans des communes possédant un chiffre supérieur d'habitants;
l'exclusion des professeurs du Séminaire israélite du droit
à la pension; enfin - et c'est un point non plus spécial
à notre culte, mais général aux trois confessions,
- les restrictions apportées à la constitution d'un fonds
de réserve et qui menacent l'avenir des Communautés.
Comme on le voit, le culte israélite a de
sérieuses objections à formuler au sujet de la Loi soumise
aux délibérations du Sénat.
Le culte protestant dont les intérêts
religieux se trouvent lésés par certaines dispositions du
texte voté par la Chambre ne s'est pas borné à la
rédaction d'un mémoire.
Ses représentants les plus autorisés,
MM. Lacheret, le doyen Jalabert, Grüner ont demandé - et obtenu
- d'être entendus par la Commission sénatoriale chargée
de l'examen de la loi.
On sait que ces messieurs avaient, en son temps,
été admis à présenter leurs observations à
la Commission de la Chambre et que leur intervention avait eu pour résultat
de faire modifier dans un sens conforme à leurs légitimes
revendications le texte soumis à la Chambre.
Il est regrettable de constater que le Consistoire
Central des Israélites de France ne se décide pas, dans les
conjonctures actuelles qui présentent une réelle gravité
pour les intérêts supérieurs dont il a la charge, à
sortir de l'ombre où depuis tant d'années il abrite ses travaux.
Que n'a-t-il imité les Synodes protestants
? Pourquoi n'a-t-il pas demandé à être entendu par
la Commission sénatoriale ? Pourquoi, par cette attitude réservée,
humiliée, penaude, donner une si piètre et surtout fausse
idée aux pouvoirs publics, du Judaïsme français alors
qu'il a tous les titres historiques, moraux et légaux à faire
figure à côté des autres cultes ?
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